Je suis donc né un lundi 30 septembre à 1h15, par le siège.
En âge de lire, je me suis passionné d'emblée pour la BD avec les lectures de Tintin et de Lucky Luke. J'ai pris la ferme décision d'en faire mon métier dès le CM2. Je me rappelle avoir éprouvé avec angoisse, dans cette salle de classe, que l'enseignement donné devait correspondre à ce qui nous attendait à l'âge adulte. L'école de l'ennui ! Le choix de la BD était salutaire. C'était la continuation des rêves, et leurs réalisations. Je me suis mis à copier mes maîtres qui changeaient d'année en année en fonction de mes nouvelles lectures. Cela a commencé par Hergé, en passant par Gotlib, puis Moébius et Bilal pour finir par Hugo Pratt et Tardi... C'est assez exhaustif !
Après avoir sagement effectué mon service scolaire, qui s'est soldé par un bac, je suis entré aux Beaux-Arts de Reims, plein d'espoir. La première année fut très décevante, très scolaire. L'enseignement étant assuré par une flopée de jeunes professeurs adeptes de l'art conceptuel... L'ennui continuait, donc ! Et puis en deuxième année, j'ai découvert que le Père Noël existait et enseignait aux Beaux-Arts de Reims, dans un atelier à l'écart. Bon, ce n'était pas le vrai Père Noël mais il lui ressemblait un peu : il s’appelait Charles Auffret, un sculpteur, un vieux de la vieille, qui parlait l'argot, vannait à tout va, la barbe blanche jaunie par le cigare collé en permanence au bec, estimant que seuls les cons ne buvaient pas ! C’était un personnage haut en couleur ! Mais surtout un maître du dessin. A son contact, j'ai découvert que l'Art pouvait ouvrir l'esprit à une nouvelle compréhension du monde.
Lors de ces séances de croquis sur modèle, sous son égide, il m'arrivait des sensations étranges pendant lesquelles il me semblait déceler un langage de la lumière. Aujourd'hui (juillet 2019) tout cela me paraît très étrange à écrire. Je ne prenais pas de drogue, je précise. Je crois que la pratique intensive de toute recherche esthétique amène à ce genre de sensations. Bref ! Pendant ces deux années, j'ai donc oublié la BD et me suis consacré au dessin, peinture, sculpture... et à l'étude de la Lumière ! J'y ai découvert Rodin, Degas, Rembrandt, Courbet et surtout Daumier, dont deux de ses toiles ornent les murs du musée Saint Denis de Reims.
Concernant les rôlistes, c'est aux Beaux-Arts que j'en ai rencontré pour la première fois. Un nouveau genre de bipède très gentil, des grosses valises sous les yeux rougis par une nuit sans sommeil, perdus dans un lointain imaginaire. Étant, moi-même, de nature lunaire et fantasque, j'ai trouvé la pratique du jeu de rôle extrêmement tentante et surtout extrêmement dangereuse vu ma nature susnommée en début de phrase. En bref, si je mettais le doigt là dedans, je n'aurais plus jamais touché terre. C'est ce que je pensais à l'époque, et me laissais à penser les rôlistes qui me parlaient de leurs activités nocturnes.
Ma démarche de l'époque était, au contraire, de contrebalancer ma propension à m'enfermer dans mes rêves, en me confrontant à la réalité. Je ne suis pas sûr d'avoir réussi en fait. Je m'étais donné comme ligne de conduite de réaliser les délires qui me venaient à l'esprit. Une sorte de quête de libération. Dans laquelle il fallait oser faire avec aplomb, ce que la peur du ridicule interdisait... On appelait ça "La quête du Pénible" avec un ami qui me guidait dans cette voie... L'alcool y était pour beaucoup...
Il n'y a pas eu de quatrième année, pour moi, aux Beaux-Arts. Après moult scandales et altercations, la bande de profs conceptuels m'a viré, d'un commun accord. L'année qui a suivi fut mise au profit d'un petit tour de France des musées en attendant d'effectuer le service national. Je l'ai fait en tant qu'objecteur de conscience, à Cognac. Une de mes fonctions était de créer un fanzine. J'ai sorti une dizaine de numéros de "L'Eléphant à Deux Trompes, l'hebdomadaire qui ne sort qu'une fois par mois", composé d'articles insolites et de BD d'humour inspirés des fonds de bouteille de pastis qui jonchaient mon bureau.
En 1994, je me suis remis sérieusement à la BD, en me cloîtrant pendant deux années, pour combler les lacunes. J'avais quand même gardé contact avec Nathalie Hertz, une copine des Beaux-Arts. Elle m'a présenté durant cette période à Laurent Cagniat (un dessinateur de BD que j'avais côtoyé aux Beaux-Arts de Reims) et à Thierry Masson. En 1996, je suis sorti de ma réclusion volontaire pour m'installer à Reims et monter un atelier : "Le Tertre du Golem". Tout un programme !
C'est à leurs contacts que je me suis mis petit à petit à illustrer des jeux de rôle. Avec beaucoup de réticences au début, car je n'y connaissais rien et ne voulais me consacrer qu'à la BD. Thierry Masson insistait beaucoup, pensant à juste titre que c'était une occasion d'essayer de nouvelles techniques, et de se confronter à la publication. Les éditeurs de jeux de rôle étaient très friands des techniques autre que celle de la BD. C'était très libre, et très enrichissant.
Un supplément d'Hawkmoon pour les éditions Oriflam fut ma première participation. Il y eut par la suite Polaris dans les suppléments Gaïa et Surface, divers scénarios pour le magazine Backstab, Nephilim pour les chroniques de l'apocalypse. Pour tous ces travaux mon dessin était très proche de mes recherches en BD. C'est dans le suplément de 7th Sea "Voir Charousse et mourir", que j'ai utilisé pour la première fois le crayon. Je m'y suis énormément amusé, tant dans le sujet que dans la réalisation.
Au cours de l'été 2000, après un énième refus d'un éditeur pour un projet de BD, j'ai décidé de faire carrière dans l'illustration armé de mon crayon à papier (un 2b), avec l'intention d'évoluer vers la couleur. Bon cela n'a duré que le temps qu'un automne et un hiver. En juin 2001 j'ai signé mon premier contrat chez Delcourt.
Cependant c'est entre septembre 2000 et juin 2001 que j'ai le plus produit pour le jeu de rôle. Pour 7th Sea, Prophecy, un module d20 (mort à freeport), le magazine Backstab, et pour finir Archipel. Le tout avec ma technique au crayon à papier que j'affectionnais par-dessus tout. Archipel a été le dernier jeu de rôle que j'ai illustré. J'ai adoré bosser dessus. L'imaginaire de ce jeu était très riche, et chaque illustration, que l'on m'a proposée, a été comme un défi. J'ai commencé avec Oriflam, et j'ai fini avec Archéon Oriflam.
Depuis, je me consacre exclusivement à la BD. Il y a eu « Les Cercles d'Akamoth », un polar fantastique scénarisé par Michael le Galli aux éditions Delcourt... Puis les storyboards de « Watch » de la Galli au scénario, aux éditions Delcourt. Sous la direction de David Chauvel, j'ai commencé à réfléchir et étudier de manière plus approfondie, voire analytique, le storyboard, la mise en scène et les cadrages.
En 2005 j'ai fais la rencontre de HUB. Le courant est passé tout de suite. A partir du tome 3 de sa série « Okko », aux éditions Delcourt, il m'a demandé de le rejoindre pour l'aider sur le storyboard de sa série de samouraïs fantastiques. Série librement inspiré du jeu de rôle Legend of Five Rings dont il était un fervent admirateur. Puis nous avons commis 6 tomes d' « Aslak », une comédie dramatique de viking fantastique. Toujours aux éditions Delcourt.
Concernant le jeu de rôle, j'ai depuis participé à quelques parties. Star Wars, Stormbringer, Feng Shui, et Cthulhu. Certaines parties ont été fabuleuses. D'autres furent pénibles. Cela dépend des joueurs. Certains ont trop de comptes à régler avec leur vie, avec d'autres joueurs, ou tout simplement avec eux-mêmes. Ça gâche tout et transforme le jeu en une sorte de thérapie malsaine où la personne fait son caca devant tout le monde ! Ça peut être gênant !
Mais, globalement, le jeu de rôle reste l'activité ludique la plus magique. Certaines parties vous marquent au fer rouge, gravant à jamais dans l'esprit des scènes que l'on a vécues, sans qu'elles aient jamais vraiment existé. C'est une belle manière de prolonger les jeux immersifs de l'enfance.
Longue vie aux jeux de rôle, donc ! Que la lumière et la Paix soient sur vous !
Bisous !
Cette bio a été rédigée entre le 8 mai 2000 et le 8 mai 2009. Dernière mise à jour le 31 juillet 2019.