Thème(s) : Médiéval Fantastique
Cugel l'Astucieux n'a rien en commun avec Conan. Rusé, égoïste, matérialiste, baratineur, il a l'habitude de quitter les villes où il passe poursuivi par une foule en colère. Ce genre de personnages est courant dans les romans de J. Vance, mais ceux qui traversent les romans rattachés à Dying Earth (Cugel l'Astucieux, Cugel Saga, Un Monde Magique, Rhialto le Merveilleux) pratiquent la filouterie comme un art de vivre !
La Terre est mourante. Les civilisations se sont succédées les unes aux autres, les éons ont passé, et aujourd'hui le Soleil est sur le point de s'éteindre. Les cultures, décadentes, sont souvent baroques et surprenantes, et la magie, même puissante, n'est plus que l'ombre de ce qu'elle était. Les hommes de ce 21ème éon sont les héritiers de plusieurs millénaires de raffinement et de sophistication, mais vivent dans le cynisme et le fatalisme de qui se sait condamné. La civilisation est de prime abord médiévale, mais personne n'est surpris de tomber de temps à autre sur un artefact magique ou technologique de l'Antiquité. En fait, le manque de curiosité est un trait répandu : personne ne sait ce qui se trouve derrière la colline suivante, et personne ne cherche à le savoir. Le voyageur a donc l'impression de voyager d'un microcosme à un autre, et de trouver chaque fois des moeurs et des coutumes plus exotiques que dans le village précédent. Quelques villes majeures existent, dans lesquelles les hommes cultivés (lire "pédants") ratiocinent avec délectation sur le sens de la vie, la couleur du soleil, ou les civilisations disparues.
Arrogance, avidité, gourmandise, luxure, pédanterie, sont des défauts partagés par tous.
Voilà, très brièvement présentée, l'atmosphère qui règne sur les ouvrages qui composent "le Cycle de la Terre Mourante", de J. Vance. Dying Earth en est l'adaptation en jeu de rôle (la seconde adaptation d'une série de J. Vance après Lyonnesse.)
La tâche de concevoir un système de règles à la mesure de cet univers a été confiée à Robin D. Laws (Herowars, Feng Shui, Pantheon), et le résultat est original. Il se devait de l'être, car le jeu est centré autour de ce système, qui est censé permettre de reproduire autour d'une table l'atmosphère des romans.
La création de personnages permet trois niveaux de jeu, nommés d'après les personnages principaux des romans : Cugel, Turjan, et Rhialto. Escroc de bas-étage, magicien explorateur, ou Maître des Arcanes commandant aux puissants mais capricieux Sandestins, les trois styles de campagne sont possibles. Le nombre de points à répartir lors du processus de création dépendra de ce choix : pour un personnage du niveau de Cugel, la norme se situe entre 1 et 10 points pour chaque talent. La norme grimpe jusqu'à 15 pour un personnage du niveau de Turjan, et 20 pour un homologue de Rhialto.
Les quatre talents ou habilités les plus importants sont la persuasion, la rebuffade (la résistance à la persuasion), l'attaque et la défense. Pour chaque talent, existent 6 spécialités. Par exemple, pour la persuasion, on a l'éloquence, le charme, ou l'intimidation. En matière de rebuffade, un personnage pourra être obtus, méfiant, pointilleux, etc...
Cette spécialisation a plusieurs conséquences, car en plus de déterminer le style de verbiage d'un personnage (ou de combat), chaque spécialité en contre une, et est pénalisée face à une autre. Quand deux personnages possèdent deux spécialités antithétiques, cela affecte grandement l'opposition.
Celle-ci se simule de la manière suivante : le personnage, actif, lance 1D6 : de 1 à 3 c'est un échec, de 4 à 6 une réussite. Le personnage qui se défend, peut lancer un dé en réaction. S'il réussit, cela annule l'effet de l'action. A ce moment-là, le personnage actif peut dépenser un point de son "pool" (égal au départ à son score dans le talent) pour relancer le dé. S'il réussit, le personnage en réaction a lui aussi la possibilité de dépenser un point pour lancer un dé et tenter d'annuler cette réussite. Et ainsi de suite.
Le système se complique de plusieurs façons :
- On peut relancer un mauvais résultat en dépensant un point.
- Un "1" est un échec retentissant, et il faudra payer 3 points pour relancer.
- Un "6" est une victoire éclatante, et l'adversaire devra payer 2 points pour l'annuler. En outre, le pool du personnage augmente de 2 points, que le "6" soit annulé ou non.
- Dans certains cas, les personnages peuvent subir une "taxe" qui augmente le nombre de points qu'ils doivent payer à chaque jet de dé, ou d'une "ristourne" qui le diminue.
- Il existe également des bonus ou malus sur les jets de dés, des règles particulières pour les actions prolongées, d'union des personnages, et bien d'autres petites variantes.
L'opposition prend fin quand un des deux personnages n'a plus de points, ou quand l'un des deux renonce. Voilà le coeur du système de règles, qui s'adapte au combat, à la magie, et à toutes les autres situations.
La façon dont le "pool" d'un personnage se reconstitue dépend de la compétence. Un personnage qui a choisi le charme comme style de persuasion, regagnera par exemple ses points après une soirée mondaine passée à porter des toasts et à se vanter de ses exploits jusqu'à en avoir la gorge râpeuse...
La règle de l'expérience constitue elle aussi une originalité : un personnage progresse s'il a réussi à caser de façon appropriée et divertissante les phrases que le maître de jeu lui a confiées au début de la partie. Le but est d'inciter les joueurs à s'exprimer de façon "vancienne" : "Cessez ces chamailleries ! Je suis en train de me soumettre aux caprices exotiques d'une belle princesse et ne saurait être dérangé" ou "Un éventail de morts variées et contrastées pourra être inclus dans la punition" en constituent deux exemples.
On l'aura compris, la verve, la faconde, l'humour "pince-sans-rire", le fatalisme (le joueur doit accepter que son personnage se fasse convaincre, flouer, escroquer), mais aussi la courtoisie, et les bonnes manières ("Cher inconnu, je suis au regret de vous informer que je suis anthropophage, et que votre arrivée fortuite améliore grandement mon menu du jour"), sont les qualités des joueurs que le système de règles tente de développer.
Changer de niveau d'aventures et passer du niveau "Cugel" au niveau "Tujan" ne fait pas que changer d'échelle : magiciens reconnus et aventuriers courageux, les personnages vont sillonner la Vieille Terre et d'autres dimensions, et dans leur quête de puissance rencontrer bien des horreurs et des situations terribles. Plus qu'une langue agile et un prompt esprit de répartie, les héros auront besoin d'acier tranchant et de sortilèges redoutables. Un supplément, Turjan's Tome of Beauty and Horror, permet de faire les accommodations nécessaires au jeu pour s'adapter à ce style différent.
Le niveau de jeu "Rhialto" a également son supplément, "Rhialto's Book of Marvels".
Cette fiche a été rédigée entre le 8 mai 2000 et le 8 mai 2009. Dernière mise à jour le 11 février 2011.
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