J'ai commencé à jouer aux JdR sur table, comme beaucoup d'Espagnols de mon âge, vers 1990 avec JRTM. Je me souviens avoir eu d'énormes problèmes pour comprendre le livre mais néanmoins avoir beaucoup de plaisir. En fait, j'ai découvert le Seigneur des Anneaux et la Terre du Milieu grâce à ce JdR, et ensuite je suis passé aux romans. À partir de ce moment, j'ai continué à jouer jusqu'à aujourd'hui (juin 2021). J'ai essayé de nombreux loisirs, en les laissant et en y revenant de temps en temps, et j'ai toujours eu un grand amour des jeux de toutes sortes et sous toutes les formes, mais les JdR sur table sont les seuls que je n'ai jamais abandonnés.
En 2010 je voulais vraiment jouer à un JdR qui n'existait pas à ce moment-là : un jeu de sword & sorcery inspiré par les mythes et la culture de la Mésopotamie (pas un jeu purement historique, juste une espèce de "Mésopotamie fantastique"). Ingénieur de profession, j'ai toujours aimé l'histoire et j'ai commencé à consacrer beaucoup de temps à étudier la géographie, la culture et la période historique. Armé de ces connaissances, et inspiré par le culture du DIY (do it yourself/fais-le toi-même) qui a toujours entouré les JdR, j'ai décidé de transformer ce désir en jeu : La Puerta de Ishtar.
Au début, cela devait être un petit truc ; un jeu pour moi-même et des amis proches. Mais, pour me pousser davantage, j'ai commencé un blog dans lequel j'ai fait le suivi de mes progrès, et les choses se sont emballées à partir de là. Des illustrateurs fantastiques se sont intéressés au projet et ont voulu travailler avec moi, et de nombreux fans ont donné des idées. Le jeu a concentré tant d'intérêt que j'ai eu l'occasion de gérer une partie de test publique d'une manière très structurée, ce qui m'a valu énormément de retours qui ont beaucoup amélioré le jeu. En pensant à cette époque a posteriori, je pense que plusieurs facteurs ont contribué à ce succès : mon amour des mythes et de la culture mésopotamienne, le côté distinct du cadre de jeu, la manière dont j'ai conçu et testé le système, l'air du temps, et mes compétences en enseignement et en écriture technique.
Une analyse complète sortirait du cadre de cette biographie et ne devrait sans doute pas être faite par moi-même, mais le résultat final est un jeu dont je suis extrêmement fier. J'ai eu la chance d'être précisément au bon endroit et au bon moment. La Puerta de Ishtar est un jeu écrit pour optimiser la facilité d'apprentissage (mon éternel amour de l'enseignement), avec un cadre de jeu dont l'objectif est d'inspirer, utilisant une licence libre (Creative Commons), après avoir fait une recherche approfondie des jeux disponibles sur le moment (prenant exemple sur l'analyse moderne que j'utilisais pour ma thèse de doctorat), et lancé lors de la première campagne de financement participatif pour un JdR espagnol. Ce fut un succès retentissant et le jeu a obtenu plusieurs prix "jeu de l'année" dans le monde du JdR espagnol. Ce que je ne comprends vraiment pas à ce jour, c'est comment j'ai réussi à finir le livre tout en travaillant sur ma thèse. La Puerta de Ishtar est sorti fin 2012, après plus de deux ans de travail.
Dans ce processus je n'ai pas seulement appris beaucoup sur la conception de jeu, mais aussi les ficelles du métier (bien qu'à un niveau basique) pour l'auto-édition d'un livre. J'ai fondé Other Selves, une maison d'édition dont le seul objectif était de sortir La Puerta de Ishtar, mais ensuite j'ai réalisé que je pouvais aider d'autres qui étaient dans une situation similaire ; des auteurs qui avaient besoin de transformer leurs grandes idées en un véritable jeu que vous pourriez toucher et tenir en main. C'est pourquoi Other Selves publia Ablaneda, le premier livre que j'ai sorti sans l'avoir écrit moi-même, devenant un éditeur complet.
Une fois de plus, les choses ont évolué plus loin à partir de là : Other Selves a ensuite sorti Ryuutama en espagnol, un jeu que je connaissais par mon amour du Japon et de sa culture. Puis, deux autres personnes, José Manuel Sánchez García et Gabriel García-Soto Barrenechea, ont rejoint Other Selves et notre rythme de sorties a augmenté, même s'il est encore petit comparé aux standards de l'édition de JdR (en fin de compte, ça reste notre loisir). Ensemble nous avons édité Máscaras del Imperio, un jeu "baroque-pulp" inspiré par les BD espagnoles des années 40 et qui a pour cadre une version pulp de l'empire espagnol du 17e siècle. Nous avons aussi traduit Dungeon Crawl Classics, Tenra Bansho Zero et Against the Dark Master (retour à JRTM !) en espagnol et publié une gamme de suppléments (les Livres Phlogiston) pour Dungeon Crawl Classics en anglais.
En même temps, j'ai aussi commencé à faire un peu de création de jeu et de travail de traduction, pour des éditeurs tant étrangers qu'espagnols. Vu que cela n'a jamais été mon travail quotidien (et je ne veux pas que ça le soit !), j'ai eu le privilège de toujours travailler sur des projets de passion, comme ma traduction des Légendes de la Garde (j'ai réussi à persuader l'éditeur espagnol de prendre la licence et de sortir ce jeu en Espagne, et de me laisser le traduire !) ou mon travail pour Kobold Press. Avec le temps, j'ai travaillé professionnellement avec de plus grosses compagnies de jeu : j'ai eu la chance de me voir offrir le travail de coordinateur de traduction pour l'édition espagnole de Donjons & Dragons 5e édition pendant son contrat avec Edge Entertainment (avant que WotC ne reprenne la main en 2021), une occasion sur laquelle j'ai sauté. Mon boulot le plus récent se fait chez Corvus Belli, à travailler sur un projet que je ne peux dévoiler pour le moment.
J'ai dit auparavant que les JdR ne sont pas mon boulot quotidien, et je pense que je dois préciser cette affirmation car, en un sens, les jeux le sont ; avec le temps, mon travail quotidien est devenu de plus en plus mêlé aux jeux. J'ai terminé ma thèse en ingénieurie des télécommunications, et travaillé comme professeur à l'université centrale européenne San Pablo, une université espagnole. Là j'ai eu l'occasion de fusionner mes deux passions : les jeux et l'apprentissage. Mes recherches récentes ont porté sur le domaine des jeux sérieux et de la réalité virtuelle pour la rééducation et l'enseignement. J'ai travaillé comme auteur de jeu pour Werium Solutions, une compagnie qui développe des jeux vidéos pour la rééducation. J'ai été à la pointe de la création d'une maîtrise scientifique en réalité virtuelle en partenariat avec Playstation, et j'ai conçu une licence scientifique en technologies pour jeux vidéo et graphiques numériques qui, j'espère, sera lancée en 2022. Je crois vraiment que l'enseignement et les jeux sont les deux faces d'une même pièce, et que la réalité virtuelle et les JdR sur table sont plus similaires que beaucoup de gens ne réalisent. Le cercle a enfin été bouclé : parmi les cours que j'enseigne à l'univesité, il y en a un en conception de jeu, où j'utilise les JdR pour faire prendre conscience aux étudiants de quelques concepts fondamentaux.
Je joue pratiquement à n'importe quel jeu sur lequel je peux mettre la main, mais mes jeux préférés (autres que ceux que j'ai écrits ou publiés) sont Delta Green, Blue Planet, Wraith et JRTM. Vous pourriez dire que je suis plus quelqu'un atttaché aux mondes. Ces jours-ci je joue d'habitude deux fois par mois en moyenne. Parfois davantage (une fois par semaine), parfois moins (une par mois). Bien sûr, aux conventions d'été ou autres événements similaires, je joue autant de fois par jour que je peux. Je joue avec mon épouse, mes amis de toujours et d'autres auteurs et éditeurs espagnols qui, dans certains cas, sont les mêmes personnes. La communauté du JdR espagnol est petite et soudée. J'aime bien faire du grandeur nature de temps en temps, même si j'en faisais davantage au cours de ma vingtaine ou au début de ma trentaine.
Message à tous : "Those who believe there's a difference between learning and playing don't really understand either of them."
(Ceux qui croient qu'il y a une différence entre apprendre et jouer ne comprennent pas vraiment l'un ou l'autre.)
On trouvera également une autre biographie de l'intéressé, en espagnol, sur son site.
Pour en savoir plus (vidéos) :
Interviews écrites :
Cette bio a été rédigée le 8 août 2015. Dernière mise à jour le 27 juin 2021.