Livre à couverture souple de 436 pages, sous-titré from enchantment to fulfilment. L'image de couverture représente un couteau ornemental et, pour les personnes averties, un pénis de wraeththu.
Une fois la couverture franchie, après la page des crédits et la table des matières, le Prologue (10 pages) est une courte nouvelle d'ambiance dans laquelle Mikey, un jeune garçon portant lunettes et t-shirt Linux, mal dans sa peau, est enlevé par les wraeththus pour être "incepté" : transformé en "har" (nom que se donnent les wraeththus) par Adam, un de ses seuls amis ayant été lui-même récemment transformé, il devient Boline, "la lame qui aidera à l'accouchement d'un monde nouveau." Au passage, il a perdu ses kilos et ses poils superflus pour devenir un hermaphrodite lissé dont le nouveau corps fourmille de nouvelles sensations... Tout le long de l'ouvrage, les marges contiennent des citations édifiantes permettant au lecteur de s'imprégner de l'esprit et de la pensée des wraeththus (exemple : "Let's fuck the fucking fuckers.", "As man was beyond the ape, so Wraeththu is beyond man.", ou encore "Evolution is just another name for mass genocide, if you ask me. What happened to the Dinosaurs should happen to men."). Signalons aussi, dans l'en-tête de chaque page, des dessins de dés polyhédriques permettant, en ouvrant une page au hasard, de simuler des jets de dés pour les joueurs n'en ayant pas.
Puis, l'Introduction (36 pages) rappelle ce qu'est un jeu de rôle en prenant bien soin d'avertir les joueurs des erreurs à ne pas faire si d'aventure ils organisent un grandeur-nature : éviter les armes chargées et tranchantes (du moment qu'elles sont déchargées, ça va), et il est "suggéré" (sic!) de se contenter d'imaginer les scènes d'aruna et d'inception. La seconde partie de l'introduction présente le monde et, surtout, les wraeththus : leur biologie, leur sexualité, l'inception, leur language (le harish). Les tribus et les niveaux magiques terminent ce chapitre.
Megalithica and Beyond (66 pages) : Megalithica, c'est le nouveau nom du continent américain, berceau des wraeththus. Le chapitre se présente comme une série de réponses à une série de questions, écrites par les wraeththus eux-mêmes. À quoi ressemble le monde d'aujourd'hui ? Où sont les derniers hommes ? Que font-ils, comment résistent-ils à leur remplacement programmé ? Comment vivent les wraeththus ? D'où viennent-ils ? etc., toutes ces questions forment autant de sections de ce chapitre. Le processus d'inception est aussi détaillé, avec les particularités selon les tribus. Un court lexique des termes utilisés clôt le chapitre.
Tribes (42 pages), justement, présente les huits principales tribus de wraeththus. L'origine des tribus est incertaine, même si certains l'expliquent simplement par des divergences de vues entre les premiers wraeththus. Chaque tribu est présentée de la même façon : 2-3 pages de présentation générale, suivies de plusieurs paragraphes thématiques (apparence, origines, organisation, particularités, rivalités). Parmi ces paragraphes se trouvent les premières caractéristiques techniques de l'ouvrage (bonus aux caractéristiques et aux compétences liées à chaque tribu). Les dernières pages du chapitre brossent un aperçu des tribus mineures.
Character Generation (80 pages) décrit chronologiquement toutes les étapes de création d'un personnage : background, traits, caractéristiques, caractéristiques secondaires, compétences, magie, avantages et désavantages. Le passé du personnage est présenté sous forme de questions et insiste, une fois encore, sur la façon dont il a été "incepté" et ses premières "arunas". La place des femmes dans le jeu est abordée, sachant que même si le meneur accepte, en dépit des avertissements présentés, qu'un joueur incarne une femme "inceptée", celle-ci demeurera une exception stérile. Une fois les caractéristiques déterminées (pseudo-aléatoirement ou par une répartition de points), tous les autres aspects du personnage sont achetés à partir d'un nombre de points à répartir dans chaque catégorie. Des points de développement permettent de compléter un éventuel manque dans une catégorie.
Rules (66 pages) présente ensuite le système de résolution et les règles de progression. Parmi celles-ci se trouvent les bénéfices apportés par l'inception, destinés aux personnages humains. Viennent ensuite les règles relatives aux trois pouvoirs psychiques des wraeththus : la télépathie, la thermokynésis (contrôle de la température corporelle) et l'Agmara (capacité de se soigner, bien que le terme désigne la magie en général).
Les règles de combat n'occupent pas moins de 25 pages. Étant donné l'importance de l'esthétique chez les wraeththus, ceux-ci se battent avec style : après quelques explications sur les styles de combat, les différentes actions possibles sont présentées, d'abord pour le corps-à-corps, ensuite pour l'affrontement à distance. Suivent la détermination des dommages et un résumé de la séquence de résolution pour le meneur. Les soins et quelques règles supplémentaires (chutes, asphyxie, etc.) terminent le chapitre, ainsi qu'un lexique des termes de combat.
Magic (66 pages) est un chapitre à nouveau rédigé par un wraeththu, Malahkess-har-Sulh. L'inception a permis aux wraeththu de redécouvrir les pouvoirs magiques oubliés de l'humanité. Dans Wraeththu, la magie n'est qu'un phénomème naturel parmi d'autres. La magie est divisée en forces : Chaos/Ordre, Air/Terre, Feu/Eau, Esprit, Kynèse, Attraction, Plasmatique, Temporal, Phase, Destruction, Conversion. La façon d'utiliser ces forces, la philosophie des wraeththus et les castes des différentes tribus est décrite en détail dans une première partie. Puis, les règles permettant au meneur d'évaluer la difficulté d'un effet magique sont présentées, ainsi que quelques exemples de magaris (sorts). Un court lexique des termes magiques clôt le chapitre.
Appendix 1: Equipment and Availability (4 pages) est un catalogue de matériel avec une évaluation de la difficulté à se le procurer dans ce monde en déclin.
Appendix 2 (12 pages) complète le précédent avec armes et armures.
Appendix 3: Running your first game (28 pages) commence par un ensemble de conseils au meneur : comment écrire un scénario, gérer les joueurs pénibles ou qui arrivent en retard, etc. Puis, un scénario d'introduction (5 pages) est présenté, scène par scène, avec des descriptions à lire aux joueurs. La dernière partie du scénario est une liste de questions laissées ouvertes pour prolonger l'aventure. Cette annexe se termine sur la façon de jouer sans dé et des idées de scénario, ainsi que des fiches de personnages pré-tirés.
Appendix 4: Storytelling (6 pages) donne quelques conseils de narration avec, notamment, une approche progressive des relations sexuelles dans le jeu.
Appendix 5: Character sheet occupe 9 pages car, en plus des deux pages de la feuille de personnage, on y trouve une explication détaillée de son contenu.
Après la carte du monde sur deux pages, un Index (3 pages) et deux pages annonçant le Players' Guide et le Storyteller's Handbook terminent l'ouvrage.
Cette fiche a été rédigée le 6 août 2012. Dernière mise à jour le 7 août 2012.
Bon, j'ai une fois de plus sacrifié ma santé mentale au nom du GROG. Ce bouquin est l'un des pires qu'il m'a été donné de lire, et Dieu sait que j'ai pu croiser quelques monuments au cours de mes nombreuses années de fichage. D'habitude, ce type de jeu est réalisé par un auteur inconnu, aussi illettré qu'enthousiaste, dont la solitude manifeste explique le manque de recul, de relecture et tous les incroyables défauts qui en résultent. Avec Wraeththu, force est de constater qu'il n'en est rien : l'auteur des romans est de la partie, on croise Phil Brucato parmi les testeurs et Andrew Peregrine parmi les contributeurs. Mystère.
En quoi Wraeththu est-il donc mauvais ? Dans le fond, Wraeththu pourrait se contenter d'être une sorte de copie de Vampire, la Mascarade, dans lequel on aurait explicité, mis en avant la sexualité, là où elle est précisément sublimée par le thème vampirique. Tout d'abord, justement, si les histoires de vampires ont pu attirer certains, par leur esthétique et le folklore romanesque et cinématographique, l'idée d'incarner un wraeththu me laisse songeur. Il faut aimer la résille, les piercings et tatouages, l'épilation intégrale et l'hermaphrodisme à deux balles ; dans cette liste, il n'y a pas un seul élément qui m'attire.
Rien que les dix premières pages font frémir. Transformé par Adam, le jeune Mikey devient-il l'Ève de celui-ci ? Oui, forcément ; mais "Boline", c'est un nom plus "cool" qu'Ève, du moins pour les wraeththus. Voilà, voilà. Si vous appréciez ces dix premières pages, peut-être que Wraeththu est un jeu pour vous. D'autant que les 390 pages qui suivent sont à l'avenant. Attention, toutefois, si vous êtes une femme. Les femmes sont un véritable problème dans ce jeu : selon les romans, on ne peut pas les "incepter" et les wraeththus se contentent de les tuer. Comme on nous l'explique dans les quelques paragraphes consacrés à la question (Women and Inception), en plus, elles se font piquer les "best and brightest men" par les wraeththus. Et puis, d'accord, en admettant que les rumeurs soient vraies et que, quelque part, dans un endroit perdu et dont personne ne veut entendre parler, il existe quelques femmes devenues wraeththus, le meneur doit bien comprendre que si cela venait à se savoir, cela provoquerait immédiatement une guerre (?). Heureusement, ces wraeththus-là, même s'ils ne diffèrent en rien des autres wraeththus, tous égaux dans la perfection wraeththuesque, nous dit-on, ils diffèrent juste dans le fait qu'ils ne peuvent pas se reproduire. Un détail, allez...
Bon, passons à l'écriture, la présentation de l'ouvrage : tout simplement lamentable. Le vocabulaire spécifique n'est pas introduit au fur et à mesure de l'ouvrage. De toutes façons, très vite, on n'a pas vraiment envie de comprendre de quoi on vous parle, surtout en ce qui concerne les détails anatomiques des nouveaux organes sexuels pédonculés de votre personnage (au fait, n'ai-je pas oublié de vous signaler que les sécrétions génitales des wraeththus étaient un "poison caustique" pour les humains ?). Autre tare de l'écriture, dès qu'on sort de l'apologie wraeththuesque pour s'adresser au joueur, c'est pour trouver des conseils qui, s'ils ne sont pas fondamentalement mauvais, sont terriblement creux. D'ailleurs, étant destinés à des personnes ne connaissant pas le jeu de rôle, je n'ose imaginer la réaction d'un débutant découvrant le jeu de rôle à travers ce jeu... On n'échappe à aucun cliché du JDR, tant pis pour la mystique wraeththuesque : des pouvoirs "cools" et des armes à feu, que demander d'autre ?
Allez, pour finir, deux-trois perles relevées au cours de ma lecture : A word of warning: combat can be fatal. m'a arraché un sourire. J'ai aussi particulièrement apprécié ce conseil au meneur souhaitant se risquer à jouer sans dés : If you're not sure about something, just veto it. Enfin, j'ai remarqué qu'au niveau du système de combat, la tête et le cou sont considérés comme des endroits particulièrement sensibles du corps mais, étonnamment, c'est bien le seul chapitre où l'on n'insiste pas sur les organes génitaux. La table de localisation des dommages ne mentionne qu'un vague abdomen. Sans doute les wraeththus ont-ils des organes en béton, en plus d'être à fourrure et à pétales...
L'unique exception à toutes mes critiques est l'étonnante annexe 4, la seule qui semble prendre un peu de recul sur tout ce fratras pour esquisser (rien de bouleversant, quand même) des pistes pour aborder sereinement la sexualité en cours de jeu (cela dit, d'autres critiques sur Internet en ont cité des passages comme l'exemple même de ce qui les a fait hurler...). Bref, Wraeththu est nul, à moins d'être vraiment enthousiasmé par les romans, et encore... Petite parenthèse : à la réflexion, les wraeththus sont à peu près le contrepied précis des vampires. Là où les vampires vivent cachés, les wraeththus ont conquis le monde et font le plus de bruit possible ; là où les vampires doivent lutter contre la Bête qui les habite (du moins, en théorie), les wraeththus assument totalement leur débauche (génocide des femmes et des enfants) ; les vampires viennent du passé, les wraeththus sont le futur ; les vampires ont un corps mort sans besoin physique, sauf la soif de sang qui est une allégorie du désir ou de l'âme d'autrui, tandis que le corps des wraeththus est au centre de tout, et que leurs désirs n'ont rien d'allégorique.
Critique écrite en juin 2015.
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