Livre de 80 pages à couverture souple au format 16 par 24 cm.
Cet ouvrage est consacré à la plus grande ville horlogère de Suisse en 1904. Il est pour moitié un supplément de contexte, et pour moitié un scénario.
L'ouvrage débute par une page de titre, une page contenant crédits, dédicaces et remerciements, et une page de sommaire et d'avertissement. Puis un Avant propos (2 pages) expose les motivations ayant présidé à ce projet, le contenu de l'ouvrage, donne la liste des souscripteurs et souligne les parts de réalité et de fiction qu'il contient. Les chapitres suivants contiennent des encadrés présentant des personnages, réels ou fictifs, de la ville.
La Chaux-de-Fonds à la Belle Epoque (8 pages) présente la ville avec sa mono-industrie horlogère organisée avec des donneurs d'ordre et des travailleurs indépendants, une mentalité particulière et un réseau commercial. Le chapitre aborde ensuite les thèmes de la construction dans une ville en pleine expansion et de l'éducation, qu'elle soit professionnelle pour le peuple, à destination des bourgeois ou concernant les femmes. Enfin, les arts et les différents styles utilisés dans l'horlogerie sont traités. Un Guide touristique (14 pages) décrit ensuite la ville, avec ses quartiers (plan double page à l'appui), les moyens de transport internes et les voies ferrées vers d'autres endroits, ainsi que les hôtels et commerces, et passe rapidement en revue les loisirs et la prostitution.
Puis Une Cité cosmopolite (7 pages) présente l'esprit particulier de la ville avant d'examiner les différentes communautés (protestants, catholiques, juifs, germanophones, italiens) et les associations (de tir, de sport, d'aide aux démunis, loge maçonnique). La vie politique (7 pages) est ensuite traitée, avec quelques informations générales puis des descriptions des forces principales : parti radical, parti libéral, parti socialiste, mais aussi mouvement antialcoolisme et anarchisme.
Le scénario est ensuite présenté (4 pages) avec un résumé, des conseils et des indications sur comment l'utiliser et comment impliquer les personnages. Il est divisé en trois actes, chacun découpé en plusieurs scènes. Il se déroule sur fond de grève des maçons et d'occupation par l'armée de la ville pour tenter de contenir les débordements.
Les annexes (3 pages) contiennent les données techniques des personnages non-joueurs (PNJ) et les aides jeu, et précèdent les cinq personnages (PJ) pré-tirés (10 pages). Chacun est donné sur 2 pages : une de description et de données techniques, et une lettre du Docteur Favre que le PJ a reçu. Le livre se finit par trois pages de publicité pour Within, Don't Rest Your Head et Billet Rouge.
Cette fiche a été rédigée le 26 février 2014. Dernière mise à jour le 22 août 2019.
Amateur de Crimes depuis la sortie de la première édition, j'avais quelque peu perdu de vue l'actualité éditoriale de cette gamme après la sortie de plusieurs scénarios que je n'avais pas eu l'occasion de faire jouer.
L'annonce de la Chaux-de-Fonds 1904 m'a intrigué, je me demandais comment une petite ville horlogère suisse pouvait servir de cadre à un scénario d'angoisse/enquête...
A la lecture, un vrai bonheur : on découvre une ville étonnante (à tel point que l'on a envie de la visiter en chair et en os pour admirer les lieux décrits) et un scénario bien ficelé qui parvient à maintenir le MJ et les joueurs en haleine.
Les 40 premières pages du livret décrivent la ville dans ses moindres détails. Les lieux, personnages et événements sont présentés clairement afin d'être utilisables directement dans le scénario. Les nombreuses illustrations (essentiellement des reproductions de photos d'époque) donnent le ton et peuvent servir durant la partie pour remplacer une fastidieuse description.
Les 40 pages suivantes contiennent le scénario proprement dit, découpé en plusieurs scènes modulables et modifiables. J'ai là aussi apprécié les illustrations et les nombreux détails que l'on peut choisir d'intégrer ou non au scénario. L'intrigue est assez simple au premier abord mais les circonstances particulières dans lesquelles elle se déroule (grève des ouvriers dans toute la ville) et l'intrication des différents protagonistes donnent du fil à retordre aux enquêteurs.
Les personnages pré-tirés sont bien décrits, chacun a son rôle à jouer dans l'histoire ce qui conduit les joueurs à coopérer naturellement.
Bref, je trouve à ce scénario une vrai fraicheur et un grand réalisme qui changent de nombre d'histoires héroïques dans lesquelles les PJ doivent sauver le monde. Ici l'ambiance est primordiale, les éléments pour y intégrer les joueurs sont de qualité et en nombre suffisant. Enfin, le MJ dispose de nombreux leviers pour arranger le tout à sa sauce. C'est à mon avis un livre idéal à utiliser en convention ou pour faire découvrir Crimes à de nouveaux joueurs.
Critique écrite en août 2014.
Voici un supplément inattendu et surprenant pour Crimes, que ce guide qui a pour objet une ville au nom tout aussi improbable, située en Suisse francophone. Œuvre d’un natif de la région, passionné à la fois par le projet Historique de Crimes et par l’Histoire tout court, on découvre donc cette ville inconnue, réputée pour sa tradition horlogère. Plongeant dans les archives historiques agrémentées par les cartes postales et photos d’époque, Lionel Jeannerat nous offre une visite guidée au siècle dernier avec un luxe d’information et de détails qu’il raconte de façon gourmande.
L’expérience est assez déroutante, et il vous faudra une certaine dose d’inventivité pour propulser vos joueurs précisément dans cet endroit, tout comme il vous faudra une certaine dose d’inventivité pour camper cette excursion en Suisse, tant les informations données par Lionel Jeannerat montrent le décalage culturel entre ce pays et la France : des clivages politiques beaucoup moins accentués même si existants, une pratique religieuse différente marquée notamment par la prédominance du protestantisme, et puis l’industrie horlogère tellement symbolique de cette contrée. Dit autrement, il sera difficile de déplacer le décor de la Chaux-de-Fonds pour préfigurer une autre petite ville de province – réelle ou imaginaire – qu’on voudrait exploiter en France.
Pourtant, et même s’il serait dommage de ne pas tenter l’expérience grâce à la qualité de la visite touristique faite, ce supplément peut servir aussi de modèle de construction pour produire soi-même un guide similaire sur une petite ville de sa connaissance, et partir dans la même exploration de son passé et de son iconographie que le fait Lionel Jeannerat. Le soutien d’institutions locales, comme celles affichées dans les crédits du supplément, ou des collections comme Mémoire en Images sont autant d’invitations pour se lancer dans une aventure similaire. Je rejoins ici complètement la critique et la proposition de Genseric dans Le Maraudeur.
Pour qui voudrait explorer en revanche la Chaux-de-Fonds telle que présentée, l’auteur n’a pas oublié non plus un copieux scénario, qui se trouvera d’autant plus facilité avec les pré-tirés proposés pour justifier un séjour local. Ce scénario a notamment le mérite d’exploiter intégralement le décor proposé, même si on a du mal, encore une fois en raison du décalage culturel, de se projeter en Suisse avec une ville sous occupation militaire au moment où le scénario démarre… L’intrigue est habile même si elle est assez convenue, et pourra être recyclée sans difficulté pour Maléfices. Point aussi un peu discutable, sur lequel en tout cas je n'adhère pas, l’opportunité d’interagir avec Benito Mussolini qui est en ce début de siècle un ouvrier italien exilé, aux idées anarchistes violentes.
Comme les suppléments White Wolf qui recyclent parfois des criminels qui feraient mieux de rester dans les poubelles de l’Histoire, je suis personnellement peu à l’aise pour introduire une crapule comme Mussolini comme PNJ de premier plan. Pourtant, cela fait sens car s’il s’agit à l’époque uniquement d’un voyou et qu’il est tentant de faire entrer les joueurs dans la Grande Histoire par rapport à sa présence (in)opportune en Suisse. Mais par souci de jeu, je le mettrai soit davantage en retrait, soit je laisserai la surprise aux joueurs a posteriori. A voir donc.
Même si le scénario ne m’a pas entièrement convaincu, ce petit supplément reste un petit bijou de précision et de réalisation, particulièrement inspirant, à vous procurer instamment pour l’ajouter dans votre collection de Crimes !
Critique écrite en février 2023.
Ce supplément pour le jeu de rôle noir « Crimes » pourrait donner des idées à bien des offices du tourisme ainsi qu’à de nombreux fans. Ou comment allier amour du patrimoine et jeu de rôle…
Crimes a pour cadre la Belle Époque et si l’on s’en tient à son livre de base, on aura tendance à ancrer ses histoires dans Paris, ville d’ombres et de lumières. Pour le public français, cela peut suffire. Mais que diriez-vous d’explorer les mystères et les légendes de votre propre ville ou région ? C’est en tout cas – si la sauce prend – la porte qu’ouvre ce supplément sur la métropole horlogère, fruit d’une collaboration franco-suisse. Le but est bien entendu de proposer un lieu détaillé, chargé d’histoire et propice aux scénarios tordus et retors que permet Crimes en général, mais aussi de propulser sous les feux de la rampe une région en mettant en avant ses qualités touristiques. Cette nouvelle façon d’aborder le jeu de rôle permet – comme ce fut le cas pour ce supplément – d’obtenir des fonds auprès d’institutions qui, de prime abord, n’auraient sans doute jamais versé le moindre centime d’euro pour un JdR.
Mais intéressons-nous de plus près à ce que ce livret de 80 pages en noir et blanc et au format 16x24 cm nous propose. Sur près de quarante pages, la région et la ville de la Chaux-de-Fonds à la Belle Époque seront décrites avec minutie. D’emblée, les précautions d’usage sont cependant prises : l’auteur, Lionel Jeannerat, nous signale que, pour « pimenter le scénario et éclairer les zones d’ombres », il a dû prendre quelques libertés avec la réalité historique. On demeure de cette manière dans l’esprit même du jeu, qui ose le fantastique mais à petite dose, en toile de fond plutôt qu’en trame principale. Cette partie se divise en quatre chapitres : « La Chaux-de-Fonds à la Belle Époque », « le guide touristique », « une cité cosmopolite » et « vie politique ». Ces infos seront utiles dans le cadre du scénario mais aussi afin de développer vos propres intrigues et vont de l’anecdotique à la véritable petite perle d’inspiration.
Une initiative qui fera des émules
Le scénario se découpe en trois actes comptant chacun de trois à six scènes. Il se tiendra pendant une grande manifestation ouvrière ayant nécessité l’occupation militaire de la ville. Les personnages seront engagés par le docteur Favre pour enquêter sur la disparition du corps d’un ouvrier dans sa clinique alors que sur le chantier sur lequel le travailleur d’origine italienne fut mortellement blessé, on commence à parler de malédiction. C’est plus un gros scénario qu’une mini-campagne et il demandera de la subtilité de la part de vos joueurs, mais il est bien rédigé et promet de beaux moments de jeu si vous savez mettre en scène le climat insurrectionnel des maçons grévistes, la menace des militaires et de la police et le clivage social entre les différents milieux de la société locale. Notez que le livret prévoit des personnages pré-tirés faciles à intégrer à l’histoire.
Pour en revenir à l’initiative en elle-même, elle pourrait donner des idées à différentes associations rôlistes ou de passionnés : pourquoi ne pas proposer – via souscriptions et fonds publics – une vaste gamme de suppléments sur les patelins chers à notre cœur ? Que ce soit en France, en Suisse, en Belgique ou partout ailleurs, nos villages et nos cités regorgent de lieux obscurs ou hauts en couleurs qui accueilleraient volontiers l’un ou l’autre scénario ! Pourquoi les grandes capitales européennes comme Paris ou Londres seraient-elles les seules à mériter un éclairage documenté en jeu de rôle ? Dire que l’on prétend parfois que les rôlistes n’ont pas les pieds sur terre…
Chronique de Genseric Delpâture publiée dans le Maraudeur n°13.
Critique écrite en octobre 2014.
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