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Fluctuat, nec mergitur

Quand on aime les jeux, on a toujours 20 ans ?

Par PM

Rubrique : Grog
Date : 08 mai 2020

20 ans, le GRoG a 20 ans ! Bon sang que ça passe vite !

Ce site n'aurait pas été possible sans les dizaines de mains plus ou moins petites ou grandes qui, dans l'ombre des coursives du GRoG, ont ramé dans la même direction. Merci à vous tous !

Pour l'occasion, quelques pilliers de l'institution reviennent sur le chemin parcouru, les défis posés par l'évolution de notre loisir, et les enjeux de l'avenir…

La fin d’une époque.

Les 10 ans du GRoG sont venus et le site est reparti pour une nouvelle époque épique. Ce qu'il ne sait pas encore, c'est que pour lui le monde ludique est en train de changer et que le prochain Monde du Jeu, où sera dévoilé le vainqueur d'un prix spécial GRoG du public... sera le dernier, cette manifestation tirant sa révérence. Certains en sont soulagés, le salon donnant de plus en plus d'importance aux jeux vidéos au détriment des jeux plus classiques. En revanche le GRoG ne peut que regretter ses dizaines de tables permettant de découvrir quelques nouveautés et toujours autant de jeux exotiques. Au passage (quelle surprise !!!) le gagnant du GRoG du Public n'est autre que l'un des plus grands succès roliludiques dans notre pays, le Grand Ancien en personne.

La grande conséquence pour le GRoG de cet état de fait, c'est que la grosse manifestation attirant en un point centralisé (jacobinisme français oblige) la plus grande partie de ses membres et nombre de sympathisants, va disparaître. Si le GRoG a déjà été et sera encore bien présent dans de nombreuses manifestations plus locales (RPGers, Octogones, etc.), c'est par contre toujours en équipe réduite, de une à au plus une demi-douzaine de personnes pour les "grosses" occasions. Cela aura son effet sur l'ambiance générale de l'équipe qui devra beaucoup plus se reposer sur les relations électroniques que sur les grosses rencontres pour donner naissance à un "esprit de corps". Le Président en activité durant la décennie qui suit va finalement mettre à profit une grande demeure familiale pour y organiser des rassemblements des membres du GRoG (avec d'autres joueurs quand même, il ne faut pas exagérer). Pendant quelques années, cela va permettre des week-ends mêlant longues discussions, approches culinaires grâce à Saint Brunal, parties de jeux divers (dont des tests visant à décider “si finalement ce jeu est un jeu de rôle ou pas”, dégustations de cakes toulousains, prise au filet de pauvres innocents venus pour jouer et qui se retrouveront dans la nasse de l’administration d’un site digne du Dieu de l’Ancien Testament… le tout permettant de cimenter un minimum l’équipe.

2010 est donc la dernière année du Monde du Jeu. Il faudra quelques années mais des tentatives se feront jour pour tenter de reprendre le flambeau, sans a priori réussir pleinement dans cet objectif, faute probablement d’un local aussi prestigieux que le parc des expositions de la Porte de Versailles qui avait déjà accueilli le Salon du Modélisme et du Jeu de Réflexion, le rendez-vous incontournable des éditeurs et du public durant des années, jusqu’à ce que le Monde du Jeu ne reprenne le flambeau. En contrepartie, des manifestations plus localisées commencent à gagner en importance comme OctoGones à Lyon ou les Utopiales. Le Festival International des Jeux de Cannes, grâce à l’activité du GRAAL, se met à donner de l’importance au jeu de rôle en lui donnant un espace tel que pour la première fois depuis des années, pratiquement tous les éditeurs diffusés en boutique peuvent s’y retrouver. Il va jusqu’à accueillir un nouveau prix, les GRAAL d’Or, depuis 2019. Le GROG y a été présent durant quelques années dans la première moitié des années 2000. Par la suite, le président du GRoG en fut longtemps un habitué, mais le GRoG est maintenant à nouveau présent pour présenter son action aux festivaliers.

Dans le même temps, notre loisir évolue et si la mission du GRoG ne change pas, les axes de son action sont amenés à évoluer.

Les nouveaux défis du GRoG

Le fil d’actualité du GRoG , longtemps une référence pour tenir les joueurs au courant des événements qui touchent à notre milieu, finit par être supplanté d’abord par le développement des web-forums, dans la deuxième moitié des années 2000, et encore plus dans la décennie qui vient de s’achever. Ceux-ci permettent de faire circuler l’information de façon bien plus rapide, devenant la principale source d’informations de nombreux joueurs, avant eux-mêmes de perdre de leur importance face aux réseaux sociaux. Facebook bien sûr, mais aussi durant son existence Google+, sont devenus des incontournables en ce domaine. Avec cependant le défaut du manque de recul dans les discussions une fois une information transmise. Quoi qu’il en soit, de fait, le fil d’actualités du GRoG a perdu de sa pertinence et son suivi s’est concentré sur des informations plus directement liées au monde de l’édition et aux projets de celui-ci.

Et des projets, il y en a ! Et donc d’autant plus d’éditeurs.

Le début des années 2010, c'est en effet aussi l'époque où les derniers éditeurs "historiques" soit disparaissent, soit décident de se retirer dans leur donjon pour y ressasser leur splendeur perdue, tandis que de petits nouveaux apparus dans les dernières années de la décennie passée commencent à grandir en graine. Au premier rang de ces derniers, on peut trouver certains Hommes en Noirs, Voie Directe et autres Primates. Là où les salons français regroupaient une poignée de “gros” éditeurs (gros pour le marché rôliste) comme Descartes, Hexagonal, Oriflam, Multisim ou Siroz/Asmodée, et quelques éditeurs plus petits, souvent avec une durée de vie de deux ou trois ans seulement et une activité centrée sur un jeu ou deux (Flamberge, Éditions des Sept Pierres, etc.), les évolutions des technologies de l’information vont permettre l’émergence de nombreuses structures de petite taille, souvent des activités annexes pour les personnes concernées.

Deux modes de publication se sont en effet développés depuis le début de la décennie. Si aucune des deux n’est réellement une nouveauté (on les avait vus apparaître dès le milieu des années 2000), on parle bien ici du développement de leur usage. Et quand on parle d’un nouvel usage, on peut se douter que cela implique de nouvelles problématiques pour le GRoG .

Les nouveaux modes de production

La diffusion de jeux au format électronique (PDF essentiellement diffusés d’abord directement par leurs auteurs, voire sous forme de disquettes ou CD avant que des sites de vente en ligne spécialisés ne fassent leur apparition) a obligé le GRoG à se poser des questions sur la validité de ce format (ce qui fut fait en fait assez tôt, déjà à l’époque de la première itération du site) mais aussi sur des questions sur ses répercussions sur diverses données que le GRoG tente de traiter depuis sa création.

Au premier rang de ces questions figure celle de la date de parution d’un jeu. Dans un monde habitué à considérer comme telle le jour où un jeu débarque dans les boutiques, quelle est la place d’une version électronique qui ne débarque réellement nulle part ? Un jeu qui existe sous forme électronique pendant un temps puis qui se retrouve finalement publié au format papier, a-t-il “existé” durant cette première période ? Cette question se pose de façon de plus en plus aiguë avec le développement du financement participatif qui voit les jeux proposés sous forme électronique avant (et parfois BIEN AVANT) de faire un passage par la case imprimerie. Les débats ont été agités et même parfois vifs tant est fort l’attachement à l’ouvrage papier, quant à cette question. Au final, la position du site a été d’estimer qu’à partir du moment où quelqu’un qui n’appartient pas aux équipes de l’éditeur, qui a versé de l’argent pour avoir un jeu, est en mesure de jouer à celui-ci, il faut bien considérer que le jeu est paru, même si l’arrivée en boutique ne se produit que bien après.

Un autre point soulevé par l’importance prise par le PDF dans la culture rôliste est celui de l’édition d’un jeu. S’il est aisé de typer deux ouvrages imprimés “identiques” en première et deuxième édition, ou simplement en première et deuxième impression, comment peut-on aborder cette question avec des PDF, à l’heure où l’un des principaux sites utilisant ce mode de diffusion (drivethru) permet aux auteurs/éditeurs de modifier le fichier ? On pourra se dire qu’une mise à jour n’est pas si différente d’une réimpression. Mais quid quand les mises à jour se succèdent, parfois quotidiennement ? Quand un ouvrage se retrouve avec un fichier téléchargeable portant un numéro de version à trois chiffres ? Là, il faut bien reconnaître qu’à de rares exceptions près comme le livre de base original de Cthulhu Hack, le GRoG a dû rendre les armes et rester sur une description unique.

En parallèle au développement du PDF, une autre technologie est venue bouleverser le petit monde rôliste, le POD (Print-On-Demand). Ce procédé a pu se répandre grâce à des sites comme Lulu.com, bien connu des rôlistes, mais aussi le Createspace d’Amazon ou même Drivethru (qui après des années à se cantonner à l’électronique s’est doté de cette fonctionnalité qui lui permet de proposer également des cartes et plans, tout comme des jeux de cartes type poker adaptés à tel ou tel jeu). Cette possibilité n’était pas nouvelle, elle avait déjà été utilisée notamment par Chaosium dans le courant des années 2000 pour sa série de suppléments de la Miskatonic University Library Association. Elle a aussi pris son essor en permettant à de nombreux auteurs de proposer leurs ouvrages sans avoir à gérer des tractations avec les imprimeurs et des questions de couverture d’investissement, ou des stocks générant de fortes dépenses en terme d’entreposage comme en termes fiscaux. À ce titre, le POD a permis l’apparition de nombreux auteurs-éditeurs ayant l’envie de partager leurs créations, qui n’avaient plus qu’une chose à assurer, la partie justement créative en amont, sans avoir le souci du point d’équilibre de rentabilité. Cela a amené une floraison de titres, aux propos parfois très ciblés, comme par exemple les productions des Courants Alternatifs, et qui n’auraient pu atteindre un quelconque seuil de rentabilité avec des tirages classiques. Il faut reconnaître que du point de vue du GRoG, en dehors des questions de versions, les conséquences en termes de contraintes ont été bien moindres. Il ne reste que plus de jeux à ficher, ce qui n’est pas pour déplaire aux membres de l’équipe.

Les nouveaux modes de financement

Un autre phénomène est cependant venu bouleverser le petit monde rôliste, non pas une avancée technologique, mais de nouveaux modes de mise en lien entre les auteurs/éditeurs et leurs clients potentiels.

Nombre d’auteurs ont décidé de ne pas passer par un circuit classique pour éditer leurs créations, et ont choisi de passer par le circuit du financement participatif. Celui-ci, rappelons-le, se décline de deux manières différentes.

La plus connue est celle des campagnes de financement pour la création et/ou l’édition d’un ouvrage ou d’un jeu. Elle a pris la suite des souscriptions que l’on avait vues fleurir dans la deuxième moitié des années 2000 (Würm, déjà pour sa première édition professionnelle, Don’t Rest Your Head…). La souscription reposait toutefois sur le fait que ceux qui la proposaient avaient déjà une certaine notoriété, limitant donc cette ressource dans le cas de nouveaux venus. Le financement participatif était en revanche une voie toute trouvée pour des créateurs en quête d’argent pour mener leurs projets à bien et amener leurs créations au contact du public. Et si le jeu de rôle n’était pas initialement prévu, il s’est révélé particulièrement adapté à profiter du cadre du foulancement pour se développer. Bien sûr les éditeurs eux-mêmes n’ont pas tardé à comprendre qu’ils pouvaient également profiter de cette possibilité et si le marché français a d’abord vu des initiatives d’auteurs isolés comme R.I.P., l’exemple américain, avec notamment les 400.000$ levés pour l’édition de FATE Core puis quelques années plus tard par la deuxième édition de la 7e Mer qui a largement dépassé le million de dollars US, a amené leurs confrères hexagonaux à se lancer aussi. On se rappellera évidemment des campagnes, aussi bien américaine que française pour l’édition de la 7e édition du Grand Ancien. Aujourd’hui on ne compte plus les campagnes de financement participatif dont le GRoG se fait l’écho sur sa page de garde, même si certains éditeurs commencent à en revenir et reprennent le chemin de l’édition plus classique.

Pour le GRoG , cette mode a engendré évidemment quelques questions sur sa façon de voir les choses. Là aussi la question de la date de parution est venue animer les débats internes à l’équipe, pour finir par reconnaître que la livraison d’un ouvrage aux souscripteurs devait être considérée comme telle, même si la disponibilité en boutique n’était assurée que longtemps après, voire pas du tout. De même la question de tout ce qui entoure l’ouvrage proposé au financement, les bonus, versions collector et exclusivités, a fait l’objet de débats au sein du GRoG, ne serait-ce que par leur nature pas toujours fichable.

L’autre forme de financement participatif découle plus du principe de la rançon apparu dans les années 2000. Pour mémoire, elle reposait sur l’idée qu’un auteur proposait un pitch de jeu ; si suffisamment d’amateurs se révélaient prêts à payer pour atteindre une somme totale fixée, l’auteur “libérait” son jeu en le mettant à disposition sur le web (seul le montant total était fixé, chaque participant versant ce qu’il voulait ou pouvait). On s’approchait plus du mécénat, l’auteur étant directement payé par des soutiens afin que tout le monde puisse profiter de son travail.

C’est une démarche que l’on retrouve à la base d’un autre mode de financement participatif emmené par des sites comme Patreon ou Tipeee. De nombreux créateurs peuvent ainsi profiter d’une rétribution pour des productions personnelles mises à disposition de leurs mécènes puis, pour certains, du public en général, avec le plus souvent un décalage de temps. Divers auteurs américains se sont lancés dans cette aventure dans le courant des années 2010 (John Wick, Dennis Detwiller... dans le domaine rôlistique) mais aussi des éditeurs (Evil Hat qui proposait ainsi une gamme Worlds of FATE). Du côté français, on a vu des auteurs ouvrir leurs horizons avec cette méthode, mais aussi la création d’entités éditoriales comme la Caravelle qui propose des jeux ciblés à ses soutiens. Pour le GRoG s’est alors posée la question de savoir comment aborder les productions issues de ce mode de financement. Celles-ci sont le plus souvent réservées aux mécènes des créateurs, échappant donc à l’attention des matelots, ou mises à disposition publique sans véritables annonces, passant donc le plus souvent sous le radar de la passerelle et donc des visiteurs du site.

Le GRoG , reflet de l’évolution de la société

Afin de rester vivant, le GRoG a donc dû évoluer et répondre à la demande des joueurs, des auteurs, des éditeurs et des curieux. En cela, il reflète certains changements non seulement du monde du JdR mais aussi tout simplement de la société. Cela peut entre autres se retrouver à travers un élément anodin mais qui a son importance : les crédits. Voyons voir comme ces derniers ont été gérés par le GRoG au cours du temps.

Aux débuts du site, il n’existait sur les fiches que trois données possibles pour renseigner les crédits, trois champs : auteurs, illustrateurs et traducteurs. Exit les relecteurs et autres personnes faisant l’édition, la mise en page, le graphisme, et autres missions importantes mais considérées comme moins importantes et passées sous silence. Les textes étaient tapés normalement, avec leurs erreurs occasionnelles, et la taille des champs était limitée. La liste des personnes ayant contribué étant parfois trop longue, la liste se terminait parfois un “et al.”. L’illustrateur de couverture était cité en premier avec un “(couv)”, et, progressivement, d’autres sont venus se faire une place parmi les illustrateurs : cartographes et photographes notamment, avec leur identification entre parenthèses.

Après un an, un nouveau trublion apparaît dans les crédits : le biographé. Suite aux contacts très nombreux établis par le GRoG, le site s’enrichit en effet d’une importante section où les contributeurs au JdR racontent leur parcours rôlistique. Après quelques années, le site hébergeait déjà plus de mille biographies d’auteurs, illustrateurs et traducteurs de tous les continents. Il a fallu gérer les coquilles, les homonymes, les erreurs et les oublis au sein des crédits. Il a fallu aussi compléter les crédits “et al.” et répondre à certains contributeurs qui s’étonnaient de ne pas voir leur nom apparaître dans les crédits… Les biographies rendaient ces parfois mythiques créateurs de notre loisir plus humains, incitant certains à franchir le pas, à contribuer au monde du JdR.

À la refonte du GRoG en 2009, la V2 du site intégra cette importance accrue des crédits : tous les contributeurs cités dans les fiches gagnèrent leur fiche biographie, leur “page bio” sur le site, y compris dans la section des jeux amateurs. La plupart étaient vides et le restèrent, sauf pour la liste de leurs contributions, mais certaines se remplirent suite aux demandes de biographie qui continuent à être envoyées chaque semaine, dix-neuf ans après les débuts, en ce 20e anniversaire du vaisseau. Avec de nombreuses erreurs qui nécessitent la vigilance tant des matelots que des officiers du vaisseau. L’un d’entre eux passe plusieurs heures chaque semaine à vérifier les crédits… et à les corriger. Il y a parfois tant de crédits que le temps passé à les intégrer aux fiches et à les vérifier est supérieur à celui passé à écrire la description du contenu de l’ouvrage.

Et petit à petit, de nouvelles interrogations se firent face à des cas particuliers… de plus en plus nombreux. Le premier, bien avant l’arrivée de la V2, est celui de la publicité intempestive offerte par ces bios. En effet, certains auteurs de JdR découvrirent une nouvelle loi d’internet : il n’y a plus d’anonymat quand une recherche Google rapporte des détails oubliés des intéressés eux-mêmes. Des personnes contactèrent le GRoG pour demander à supprimer leur biographie, voire la page biographique. En effet, lors d’une recherche d’emploi par exemple, ils découvraient parfois que leur participation à un jeu de rôle les cataloguaient dans les “personæ non gratæ” pour leur employeur. Le fait était d’autant plus marqué que la page du GRoG, succès du site oblige, se retrouvait fréquemment dans les tous premiers résultats de la recherche… Supprimer la page bio et mettre à mal l’intégrité de la fiche, de la base de données ? Au même titre que pour la Bibliothèque Nationale de France, il fut choisi de ne pas revenir en arrière, ne pas supprimer un crédit. En revanche, à titre exceptionnel, le GRoG accepte de changer le nom pour mettre un pseudonyme, un nom de plume, et préserver (un peu) l’anonymat de la personne concernée.

Mais d’autres questions ne tardèrent pas à se poser : quid des personnes qui changeaient de nom ? Déjà, certaines femmes mariées adoptèrent le nom de leur époux, à la place ou en plus du leur, pour de nombreuses erreurs dans la base, heureusement vite corrigées. Certaines personnes adoptèrent un pseudonyme en cours de route, voire un autre, jusqu’à avoir dans certains cas trois fiches biographiques pour la même personne. D’autres changèrent de sexe, de prénom, voire de nom. Fallait-il une nouvelle fiche biographique réunissant tous les noms, ou deux séparées ? En effet, certaines personnes ne veulent pas avoir de rappel de leur ancien moi… Le mieux serait peut-être d’avoir des fiches biographiques séparées mais liées, ou une fiche évolutive, mais avec la version actuelle du GRoG cela paraît difficile à gérer. Encore un chantier qui attend la V3...

Les fiches — et les crédits — sont le reflet d’un certain passé, et on ne peut pas le changer facilement, ou du moins pas sans affecter la mémoire de ce passé. Les membres du GRoG sont donc amenés régulièrement à se poser des questions sur l’impact de leur loisir sur des personnes bien réelles, et à constater l’évolution de la société à travers ces petits détails… pas si petits que cela : l’humain reste toujours au cœur du jeu de rôle — et heureusement !

Les “Autres”

Un autre point vient agiter encore les activités de l’équipage. Des propositions se font entendre de diverses sources pour ajouter au site tel ou tel type de produit. D’un côté certains jeux se présentent comme des jeux d’aventures avec des personnages typés et parfois nommés. De l’autre des rôlistes expérimentent de plus en plus avec la forme ludique, partant dans des directions auxquelles ils n’auraient pas forcément pensé sans leur expérience du jeu de rôle. On nous parle des accessoires “indispensables” pour jouer, ou d’ouvrages permettant de vivre des aventures sous des formes différentes du jeu de rôle. On nous parle…

Il est certes tentant de vouloir se lancer dans l’aventure d’une exhaustivité totale. C’est aussi un bon moyen d’avoir les yeux plus gros que le ventre. L’équipage a déjà des piles d’ouvrages à traiter, ficher, enregistrer, estampiller, classer, déclasser et numéroter… Est-il nécessaire de rajouter de la charge à ce travail ? Lors les discussions s’engagent entre les matelots, et finalement les décisions tombent.

Les figurines ? pas indispensables.

Les guides, atlas, etc. ? Il y en a trop. Le GRoG a choisi de ne ficher que des ouvrages comportant du matériel de jeu. Cela élimine tous les livres détaillant de manière purement littéraire un univers mais nous a amenés à ficher des paquets de bonbons (!?!?!).

Les LDVELH ? Ca se rapproche du jeu de rôle, oui, mais… non, ce n’en est pas.

Les jeux où l’on a un rôle donné par les règles (président de ceci, gouverneur de cela, chef de XXX…), parfois même un personnage avec un nom (le HeroQuest de MB) ? Comment le dire mieux que Greg Costikyan : “La question provient de la confusion entre s’identifier à une position et jouer un rôle. Je peux m’identifier à un pion sans avoir le sentiment de jouer un rôle”.

Les jeux narratifs ? On y raconte une histoire arrivant à des personnages, dans une position d’auteur et pas d’acteur, sans jouer de rôle. Et si quelqu’un répond : “mais est-ce que c’est indispensable pour un jeu de rôle ?”, que peut-on encore répondre ?

Le fait est que le temps disponible est limité (ha, ces journées qui ne font que 36 heures, comment voulez-vous trouver du temps avec ça ?) et que tout ajout dans les objectifs de fichage pour le site ne fera que rendre la tâche plus difficile. Alors même si on aime ça, hé bien non, ça ne viendra pas sur le GRoG, au grand regret même de certains admins du site. À moins qu’une personne ne soit prête à s’investir vraiment pour assurer cette couverture, de la même façon que celui qui en 2001 a proposé de rajouter les bios pour les crédits (cf. plus haut) en se chargeant de les gérer, qui continue encore aujourd’hui (en 2020, et pour l'info, en ce jour anniversaire du 8 mai 2020, il y en a 2412). Et pas juste en proposant un “je peux vous en faire une ou deux”.

Il a donc bien fallu trouver des critères pour canaliser l’activité du site. Et au final quel meilleur critère que la devise interne du GRoG : "est un jeu de rôle ce qui après avoir joué nous a donné l'impression d'en être un".

L’évolution du site et le projet V3

En 2013, l’équipage fait le constat qu’une autre évolution de la société a un impact sur le GRoG : les technologies mobiles, tablettes et autres smartphones. Quand le site a été repensé en 2008, il n’était encore question que de navigateur web sur des grands écrans d’ordinateur, et force est de constater que l’ergonomie laisse à désirer sur les nouveaux supports. Un groupe de travail se lance alors dans le projet GRoG 2014, l’idée étant de se donner un an pour définir un nouvel usage adapté aux téléphones, et plus moderne. Les idées ne manquent pas : séparation du site en 3 sous-parties distinctes (Encyclopédie, Actualités, Associatif), relooking, design “responsive”... Ça discute beaucoup, mais il manque un vrai moteur capable de trancher les décisions et de faire avancer les choses.

En parallèle, l’équipe de développement se dit que le code dort depuis trop longtemps, les dernières montées de version de l’infrastructure datent de 2010. Mais les technologies ont vraiment bougé depuis la fin des années 2000, et les essais sont tous des échecs, par manque de temps et de connaissance : l’infrastructure a été mise en place par des membres qui ne sont plus là, la connaissance s’est perdue, et il faudrait rétro-ingéniérer le code pour comprendre quoi garder et quoi remplacer. La conclusion de ces tests tombe : si une nouvelle version du site arrive, il faut considérer qu’on repart de zéro, si ce n’est qu’on connaît déjà le comportement attendu.

C’est là dessus que la Vraie Vie™ rattrape des membres du groupe de travail GRoG 2014, qui ne peuvent plus participer alors que beaucoup comptaient sur eux. Nous sommes déjà courant 2014, rien n’a été réellement produit, et la motivation retombe. Tout le monde SAIT qu’il faut faire quelque chose mais personne n’a le temps et la motivation de s’y consacrer. Le GRoG V2 a été réalisé par 3 développeurs pendant 6 mois, dont un temps plein qui avait une vision claire de là où il voulait aller. La tâche semble trop grosse, inatteignable, à une petite équipe qui ne voit pas par quel bout prendre les choses alors qu’ils sont déjà sous l’eau à cause de l’administration du site.

À partir de là, il va y avoir des sursauts de motivation, plus ou moins gros, avec des réflexions sur certaines parties du site et ce que l’on voudrait qu’elles deviennent. Une grande réflexion est donnée par exemple à la gamification du site, pour permettre de mieux intégrer les visiteurs dans les activités récurrentes et par là-même, essayer de combler le manque de bras permanent de l’équipe.

En 2016, l’association prend même un stagiaire à temps plein pour commencer la réalisation d’une V3 baptisée grog-cubi (plus personne n’ose parler du projet GRoG 2014). Mais là encore, c’est un échec : trop de discussions, pas assez de prises de décision. Une équipe de graphistes/ergonomes bénévoles est montée pour lancer la bonne réflexion, mais l’absence d’un chef de projet capable de leur expliquer ce qui est attendu enlise les débats. Les nouveaux venus ne se sentent pas légitimes pour concevoir le GRoG de demain, cela impressionne trop.

L’échec de ce stage finit de démotiver le dernier survivant de l’équipe technique de la v2, mais il n’y a aucune relève. Les différents développeurs qui ont été recrutés dans le temps ont tous disparu rapidement sans avoir contribué réellement au site, et les bugs connus prennent la poussière sur les étagères. L’équipe d’administration prend l’habitude de les contourner plutôt que de demander à ce qu’ils soient corrigés.

La situation est bien grise quand…

En 2019, alors l’on ne se faisait plus vraiment d’illusion sur notre capacité à sortir une V3, l’espoir renaît au détour des allées de la convention Octogône. Le lead developer d’un site Internet réputé nous aborde, et il aurait vraisemblablement une équipe de dev rôlistes qui pourrait se lancer sur ce projet. En 2020, les premiers contacts sérieux sont pris et l’espoir renaît. Serait-il possible que la V3 de nos rêves puisse devenir réalité ?

Les perspectives du GRoG

Le GRoG aborde une nouvelle décennie avec un certain optimisme, en particulier avec le début des discussions pour la V3 qui devrait faciliter les choses pour les administrateurs comme améliorer l’ergonomie pour les visiteurs. Les effectifs ont subi une diminution au cours des années avec un renouvellement quasi complet par rapport à l’équipage d’il y a dix ans, un seul des admins des débuts subsistant sur la passerelle. Du sang neuf donc, peut-être pas suffisamment pour se sentir assuré, mais assez pour se dire que de nouvelles idées vont venir pour le faire progresser encore, s’adapter aux nouveaux défis qui, inutile d’en douter, feront leur apparition dans les années à venir.

En attendant… initiative !